Durant une année et demi, dans le cadre d’une recherche collaborative et à travers de nombreux entretiens, Marjorie Lelubre et Céline Graas ont cherché à mieux comprendre la réalité des MENAs dits « en errance » à Bruxelles.
D’après les évaluations effectuées par les acteurs de terrains, il y aurait près de 200 jeunes MENA d’origine maghrébine sur le territoire bruxellois et qui ne seraient pas pris en charge dans le réseau d’accueil. Parce qu’ils quittent les structures d’hébergement, qu’ils évitent certains services officiels, qu’il échappent parfois à la surveillance de leurs tutelle, ils sont déclarés en « non-recours ».
En raison de leurs conditions de vie ultra précaire, on les qualifie également « en errance ». Public interstitiel, échappant aux catégories, à la fois corps dangereux et en danger, les MENA en errance interrogent le système d’aide social et nous poussent à développer un regard neuf sur nos manière de répondre à leurs besoins.
Car des besoins, ces jeunes en ont beaucoup. Présentant des dépendances à des médicaments, des troubles de santé mentale et des transformations de leurs rapport à l’espace-temps propre à l’errance, ils sont des proies idéales pour toute forme d’exploitation.
Dans ce texte important, Marjorie Lelubre et Céline Grass nous aident à mieux comprendre ce phénomène que connaissent toutes les grandes villes européennes aujourd’hui. Car si ce public est « hypervisible » dans certains espaces de la capitale, leur parole quant à elle nous échappe, invisible, inaudible parfois. C’est cette parole oubliée que ce rapport refait exister.
L’ouvrage s’organise ainsi autour de cinq chapitres qui débutent tous par un récit d’un jeune. Cinq récits donc, afin de rendre compte de l’extrême complexité, des nuances, et de révéler la singularité de chaque situation, au-delà des idées reçues.